La crise du COVID-19 comme levier de la transition : de nuisance à plaisance
02/07/2020Ravidiran Botman / Thibaud PauwelsManifeste pour une ville post-COVID-19
Avant-propos
Convaincu qu’une crise laisse des traces et révèle des pistes à explorer, nous proposons à travers ce manifeste, différents constats qui peuvent mener à une longue réflexion sur la transition. Comme pour toute chose que nous vivons, il y a eu un avant, un moment suspendu durant lequel nous subissons le choc sans comprendre ce qu'il se passe et un après dont la durée et les effets sont et seront différents pour chacun et pour chaque thématique envisagée. Convaincu que cette crise a débloqué certaines barrières ou étapes nous proposons, à travers ce texte, notre point de vue sur une ville POST-COVID-19.
Manifeste pour une ville POST-COVID-19
Parce que la ville est complexe et intense, puisque l’esprit humain tente toujours de simplifier ce qu’il observe, voit et vit de l’intérieur nous proposons de décrire brièvement quelques pistes de réflexion pour que la crise post-COVID-19 soit source d’inspiration pour une transition sociétale sans précédent. Repensons la densité de manière raisonnée, réinventons la ville comme nous l’avons toujours fait.
I Mobilité
Parce que pour beaucoup, c’est la mobilité qui a été un des premiers impacts, nous nous sommes rendu compte que nous nous déplaçons beaucoup durant une journée complète. Ces déplacements occupent un certain temps dans une journée et un certain espace également. Le COVID-19 nous a permis de nous rendre compte : de l’importance relative de certains trajets par rapport à d’autres, de la nécessité de se déplacer à pied ou à vélo dans un espace où l’on peut s’espacer, c’est-à-dire que nos flux se dilatent dans l’espace mais en même temps ils ont diminué en quantité.
La ville marchable et cyclable.
II Inégalités
La ville est le lieu des inégalités par excellence, c’est dans la ville que se côtoient les citoyens les plus pauvres et les citoyens les plus riches. Lorsque les flux incessants laissent place au calme plat, on prend le temps d’observer notre environnement. Très vite on peut se sentir oppressé par la simple vue de citoyens qui étaient hors de notre attention lorsque nous étions le flux. Ceux-ci sont les exclus de la société que nous entretenons, les oubliés, ceux que l’on veut cacher. Ils sont et seront de plus en plus nombreux si nous poursuivons sans leur tendre la main. Imaginons la ville comme lieu deséquilibres.
La ville inclusive, la ville pour et par tous.
III Urbanité
L’importance du cadre de vie n’est plus à prouver pourtant, ce confinement nous a rappelé que tout le monde n’était pas égal face à la quantité et à la qualité de l’espace public disponible par personne à proximité de son domicile. L’espace public est monopolisé par certains usages devenu parasites puisqu’ils nuisent au métabolisme urbain. La diversité, la qualité et la quantité d’espace public disponible doit être augmentée.
La ville partagée, un cadre de vie amélioré et augmenté.
IV Isotropie des fonctions et services
Les services qui sont rendu aux citoyens sont nombreux mais ne sont pas répartis de la même manière sur l’ensemble du territoire. Cette crise met en lumière l’échec des relations entre ville et aire urbaine telle que conçue actuellement. La répartition diffuse horizontale de la ville a prouvé son efficacité durant cette crise. La concentration des activités de services est gourmande en déplacements et entemps.
La ville isotrope, la ville diffuse.
V Santé
Nos déplacements étaient pour beaucoup la seule activité physique de la semaine. Sans déplacementsnous ne pouvons pas nous entretenir physiquement. La crise nous a prouvé à quel point il était nécessaire d’avoir la possibilité d’exercer une activité physique à proximité de son lieu de vie. Fini les escapades sportives du weekend. L’activité physique est une activité qui doit faire partie de notre quotidien, à condition d’avoir l’opportunité spatiale et temporelle de s’exercer et ce à tout âge. En effet le sport demande l’espace et du temps.
La ville sportive, la ville ludique.
VI Ecologie
La ville est un lieu complexe qui offre une infinité de conditions de vie. Ayons mieux conscience des conditions de vie que nous créons, modifions et supprimons tous les jours au sein de ce métabolisme afin d’imaginer une ville co-créée par et pour le vivant.
La ville résiliente, la ville pour le vivant.
VII Transition
La transition était pour beaucoup une utopie ou bien quelque chose de très lointain. La crise du COVID-19 nous a permis de prendre le temps de réfléchir et nous questionner sur les choix que nous faisons machinalement tous les jours. Elle a éveillé certaines personnes à porter un regard nouveau sur leurs choix quotidiens. Continuons sur cette voie, les bonnes idées c’est contagieux aussi.
La ville consciente
VIII Production
La crise nous a montré la faiblesse d’un système ou produire à l’autre bout du monde pouvait coûter moins cher que de produire près de chez soi. La vraie richesse c’est de pouvoir éliminer le plus d’énergies grises possible de nos systèmes productifs. Produisons et consommons local.
L’aire urbaine comme lieu de production.
IX Rapport au temps
Sans déplacements, nous gagnons du temps. Pour travailler plus ? Pour faire d’autres choses que nous avions laissées sur le côté depuis trop longtemps? Nous avons réorganisé nos journées en donnant une moins grande importance au travail. En effet, pour beaucoup, quitter la maison tôt permet de conduire un enfant à la crèche pour ensuite prendre un train pour se rendre au travail. En donnant une autre valeur au temps, on donne moins de place au travail dans la journée qui devient une activité et non un objectif quotidien.
La ville vivante
X Rapport à la culture
La culture est omniprésente dans nos vies et nous avons essayé de la préserver ou de la réinventer malgré le confinement. La culture peut être réinventée, ré-imaginons-là ensemble. La culture peut se transmettre ailleurs que dans un lieu clos.
Ville spectacle et culturelle.
Conclusion
Malgré les nombreuses conséquences négatives, cette crise nous a toutefois démontré qu’avec peu de dispositifs il était possible de réagir rapidement. Alors qu’attendons nous pour agir efficacement sur le long terme ?
Ravidiran Botman / Architecte paysagiste
Thibaud Pauwels / Architecte